Un patrimoine…

En marge du quatuor à cordes et du trio avec piano qui règnent sur la musique de chambre depuis trois siècles, la musique du XXe siècle regorge de formations aussi diverses que les styles développés par les compositeurs.
Parmi elles, le quintette instrumental (flûte, violon, alto, violoncelle et harpe) fait cependant figure d’exception puisqu’il dispose d’un vaste répertoire original, largement méconnu.

Une des particularités de ce répertoire est le lien étroit liant la plupart des œuvres qui le composent à un groupe d’interprètes spécifique. La formation n’existerait en effet probablement pas sans la splendide carrière effectuée de 1922 à 1958 par le Quintette Instrumental de Paris, devenu en 1945 le Quintette Pierre Jamet, du nom de son célèbre harpiste.

La genèse de notre ensemble se confond avec l’histoire de la formation. C’est en effet à l’issue d’un travail sur la sonate de Claude Debussy pour flûte, alto et harpe que Samuel Casale, Valentin Chiapello et Jean-Baptiste Haye décident de constituer le quintette, à l’instar de René Leroy, Pierre Grout et Marcel Grandjany en 1922.

Le quintette instrumental se place dès sa création à l’avant-garde de la musique de chambre française. Il inspire des compositeurs issus de la Schola Cantorum à commencer par son directeur Vincent d’Indy, y compris des étrangers tels le hongrois László Lajtha. Les leçons privées dispensées par la compositrice Nadia Boulanger constituent un autre pôle de création, en participant à la maturation de styles aussi différents que ceux de Jean Françaix et du brésilien Heitor Villa-Lobos qui écrivent tous deux pour quintette instrumental.
Elèves de César Franck au conservatoire de Paris, Gabriel Pierné et Guy Ropartz trouvent dans la subtilité et la souplesse de la formation l’inspiration de pages délicates et surprenantes, empreintes de folklore.
Cette formation si profondément française séduira par la suite les membres du groupe Jeune France : Daniel-Lesur et André Jolivet, tournés résolument vers l’avenir.

Les fruits de cette effervescence créatrice sont aujourd’hui largement oubliés.
Ce répertoire méconnu se caractérise par une esthétique impressionniste oscillant entre langage néo-classique et post tonal. C’est une modernité chantante, pleine de sensualité et d’exotisme, qui s’offre au public.

…vivant…

A l’image de ses illustres prédécesseurs, le quintette Le Bateau Ivre se donne également pour vocation d’enrichir le répertoire en collaborant avec de jeunes compositeurs, dans une démarche de recherche, d'expérimentation et de création commune. 

Dès février 2020, nous interprétons ainsi le tout premier concerto pour quintette et orchestre, Les chants du rêve de Florent Nagel, accompagnés par l’orchestre Victor Hugo de Franche-Comté. Quelques mois plus tard, Les fleuves m’ont laissé descendre où je voulais de Pierre Landy côtoie Jean Cras et André Jolivet sur la scène du festival de l’Epau. 

Développer notre répertoire passe également par l'art de l'arrangement et de la transcription. Fabrice Pierre, professeur de harpe au CNSM de Lyon, nous a ainsi offert de superbes pages de Prokofiev, Chostakovitch, Debussy ou encore Astor Piazzolla. Nous collaborons d’autre part avec les brillants étudiants du conservatoire de Paris en leur soumettant des morceaux choisis chez Mendelssohn, Brahms, Webern, Trénet, Piaf...

Bouleversés par la musique de Laszlo Lajtha et André Jolivet profondément imprégnée des conflits qui ravagent l’Europe des années 30 et 40, nous souhaitons explorer davantage les expressions musicales de cette période sombre. C’est pourquoi nous avons imaginé le projet Mélodies en Guerre, vaste travail de transcriptions autour des mélodies de Francis Poulenc sur les poèmes de Louis Aragon, ainsi que la saisissante mise en musique par Benjamin Britten des Illuminations d’Arthur Rimbaud.

…pour tous.

Nous voulons faire du concert un moment accessible à tous, un temps dérobé du quotidien où chacun peut laisser voguer ses sens librement.

La démarche du Quintette Le Bateau Ivre se distingue par la recherche d’un dialogue intime avec le public, favorisé par le jeu sans partition et les présentations orales de chaque programme. Nous souhaitons instaurer une proximité avec le public en amont de chaque concert, car pour nous un public qui se sent proche de artistes, qu’ils soient connus ou non, est davantage motivé pour participer à leur concert. 

Cette rencontre se déroule sous forme de différents évènements sur-mesure qui permettent à de nouvelles personnes de se sentir concernées par la programmation.
Nous proposons ainsi des interventions surprises dans des lieux publics comme les marchés (flash-mob), des spectacles pour les enfants et leurs familles ainsi que des rencontres d’avant concert. Tous ces évènements s’inscrivent dans une approche visant à créer un lien convivial et spontané avec le public et avec les acteurs culturels du territoire.